Aucune phrase qui resterait gravée en tête, pas non plus une musique qui obsèderait au point d’avoir envie de se replonger dans le livre. Pourtant Une Famille normale a des qualités. Et comme c’est un premier roman, le fait qu’on se souvienne de l’histoire me semble déjà un signe. Facile, pensez-vous, Garance Meillon annonce dans son titre ce qu’elle va développer. D’accord… Nous suivrons donc Cassiopée la mère, Damien le père et leurs deux enfants. Quatre voix, dont les plus intéressantes sont celles des parents. Alors pourquoi une chronique puisque ce n’est pas le gros coup de cœur ? Parce qu’il y a quelque chose qui touche, surtout les premiers chapitres. Et ce n’est pas rien.
Le début d’un roman est primordial. C’est comme un premier rendez-vous. L’auteur est là, sans voir qui vient à sa rencontre. Le lecteur quant à lui cherche l’émotion, les sensations, les frissons, le rire, que sais-je encore. Ou il ne cherche rien, et attend paresseusement qu’on le séduise. Quoiqu’il en soit, il a le pouvoir. Et si la « tête » de l’autre ne lui revient pas, il tourne les talons et plus du tout les pages.
J’ai terminé ce livre, moins enthousiasmée par la fin que par le début. Mais cette auteure a quelque chose qui mérite d’y retourner voir. Une découverte à suivre en quelque sorte.
Une Famille normale de Garance Meillon (Fayard)
Merci aux 68 Premières fois de Charlotte Milandri (et à Eglantine qui pour cette nouvelle édition lui prête main forte). Ceux qui participent à notre atelier d’écriture en ligne et ceux qui apprécient le blog d’ecriturefactory disposent grâce à cette initiative d’un éclairage sur les nouveaux auteurs.
[…] « La mère s’appelle Cassiopée, le père Damien, ils ont une fille de 16 ans, Lucie, et un fils de 13, Benjamin. Cette famille-là, c’est une famille normale. Normal ? Qui parmi ces quatre êtres tourmentés peut prétendre l’être tout-à-fait ? Dès le premier chapitre s’installe un climat de tragédie. Cassiopée vient de perdre sa mère, celle qui lui a donné ce prénom, d’une reine assassinée par un dieu grec. Cassiopée, au fil des années, s’est construit un rempart de rituels, se protégeant de toute émotion. Elle a mis la vie de la famille sous contrôle permanent. Damien, c’est l’incarnation de l’amour conjugal le plus pur et le plus désintéressé, mélange de naïveté et d’incompréhension. Lucie est à l’âge des révoltes et des fuites. Audacieuse et imprudente, elle tente d’échapper à l’emprise de cette famille à la fois étouffante et lointaine. Benjamin est à peine présent sur Terre, il attend le grand voyage vers les étoiles et le monde de l’adolescence. L’auteure construit un prodigieux récit à quatre voix, le ton de chacun est juste, l’histoire est vivante, le style limpide, avec toujours les mots qu’il faut, pour nous faire partager le ressenti de chaque personnage. Qu’est-ce qui cloche dans cette famille ? En apparence, c’est une famille ordinaire, mais leurs petites bizarreries font croître la tension, jusqu’à la certitude que cette histoire va mal finir. Mais n’est-ce pas aussi le talent de l’auteure de transformer en extraordinaire ce qui n’est finalement que la vie banale de nos familles ? Et VOUS, êtes-vous bien certains que VOTRE famille est NORMALE ? Et à dix pages de la fin, quelques mots, comme écrits pour moi : « Où étais-je pendant sa chute, et comment avais-je fait pour ne pas le ressentir moi-même, pour ne pas avoir l’intuition physique que mon fils était en train de tomber ? Une mère devrait porter constamment ses enfants dans ses tripes. » Ce livre est pour moi LE coup de coeur des 68 (jusqu’au suivant !